Un mouvement est un train de naître. Il s'agit ni plus ni moins de ceux qui prennent le fameux bus 72 qui nous amène du terminus de l'arrêt de métro à notre lieu de travail. 25 mn de bonheur total. Trop c'est trop, j'ai besoin de partager ces moments à nouveau. Voici quelques explications pour tenter de décrire ce plaisir quotidien :
L'attente :
Le matin, la fréquence de passage (toutes les 20 minutes) permet d'apprécier la beauté de la neige qui s'accumule dans les plis du manteau du voisin. Ce plaisir est prolongé de temps à autre quand le chauffeur, dans un élan de générosité, passe sans s'arrêter devant l'arrêt. Le bus est plein (pas plus qu'hier), mais c'est comme ça. Reste 20 mn supplémentaire à se demander pourquoi on n'est pas resté plus longtemps au lit.
Le soir, comme il n'y a pas d'abribus, le vent nous caresse les jambes comme une masseuse américaine équipée de milliers de petites aiguilles qui transpercent le pantalon. Ce plaisir dure d'autant plus longtemps que le chauffeur improvise de nouveaux horaires, bien loin de ceux annoncés, allant même jusqu'à disparaître totalement de la circulation, laissant une ligne d'homo sapiens congelus attendre jusqu'à 45 mn dans le froid. Le chauffeur suivant n'a bien sûr aucune idée de pourquoi les 2 bus précédant ne sont pas passés, et il ne lui viendrait pas à l'idée de poser la question à son gestionnaire via leur système radio.
Le meilleur: le trajet dans le bus, ou la survie en milieu hostile.
La place assise, le graal du voyageur, est une des rares récompenses du voyage. Lorsqu'elle se présente, c'est avec empressement que le voyageur s'y encastre, la largeur du siège étant une moyenne entre la largeur d'épaule d'un enfant de 6 ans et d'un enfant de 8 an. Ce qui permet à chaque individu adulte ayant son manteau d'hiver sur le dos, d'être bien calé entre un autre passagé et la vitre glaciale. Je ne vous dis pas mon extase quand s'assoie à mes côtés une jeune femme, peu importe son apparence, tant que sa carrure est moitié moindre que celle des mes collègues masculins.
Le plus probable : la "place" debout. On peut la voir comme une place normale debout, mais partagée avec 4 ou 5 autres passagers. L'avantage, c'est qu'il n'est quasiment pas nécessaire de se tenir à quoi que ce soit, puiqu'on est maintenu par ses compagnons de voyage, avec qui la promiscuité est parfois agréable, mais plus souvent désagréable. On m'a raconté l'histoire de 2 voyageurs qui en sont venus aux mains et il a fallu quelques bléssés et 5 bonnes minutes au chauffeur pour se rendre compte de la situation et débarquer les trouble fêtes.
En un mot : "Que du bonheur".
Nos doléances ont porté leur fruits : début janvier, un bus supplémentaire sera mis sur la ligne le matin et le soir. Quelque chose me dit que ce n'est pas la fin de l'histoire ...